mardi 9 juillet 2013

Visite de la zone démilitarisée

Ce weekend, Frédéric, un petit groupe de ses amis des Nations Unis à Songdo et moi sommes partis pour une visite qui était prévue de longue date sur notre liste des choses à voir en Corée : la zone démilitarisée (ou DMZ) à la frontière entre les deux Corées.
Pour être tout à fait précis, nous ne sommes pas entrés dans la "vraie zone démilitarisée" qui, à l'exception de la Joint Security Area à Panmunjeom, est une zone interdite, et dans laquelle il n'y a de toute façon pas grand chose à voir.  La Joint Security Area - ou Panmunjeom, qui est le nom exact du village - est l'endroit où les soldats sud-coréens et nord-coréens se font face le long d'une ligne de démarcation au sol, et dans laquelle se situe le bâtiment où a été signée l'armistice à la fin de la guerre de Corée. Nous n'avons pas visité ce lieu pour deux raisons : ça triplait le prix de la visite, et il était compliqué pour les coréens d'y accéder. Ils doivent en effet demander une autorisation gouvernementale un mois avant pour vérifier que ce ne sont pas des espions communistes qui pourraient déclencher la 3ème guerre mondiale, mais également trouver 29 autres coréens pour faire la visite en groupe.

 
Sur la carte googlemap ci-dessus, vous trouverez les emplacements et noms des 4 endroits que nous avons visités, ainsi que l'emplacement de la JSA où nous n'avons pas été. Bien que nous ne soyons pas vraiment entrés dans la DMZ, toute la partie au nord du fleuve est une zone sécurisé à circulation réduite avec des check points militaires un peu partout.

Après avoir fait 1h de bus depuis Séoul, nous sommes arrivés à Imjingak, point d'entrée de la zone démilitarisée pour les visites touristiques. En effet, au delà de ce point, il n'est pas possible de visiter sans faire partie d'un tour organisé. 
Pendant que notre guide est partie prendre les réservations pour les différents endroits prévus sur le planning de notre tour organisé, nous avons pu commencer à visiter ce qui était peut-être finalement l'endroit le plus marquant de la journée :
Des hordes de touristes se battant pour faire une photo devant une stelle
La zone démilitarisée est le dernier grand symbole de la guerre froide et la triste cicatrice rappelant la division du peuple Coréen depuis plus de 60 ans. Un endroit on ne peut plus sérieux donc avec des pierres commémoratives, des messages d'appel à l'unification, ou tout simplement des mots de détresses de familles divisées par la guerre, et des militaires coréens et américains qui patrouillent un peu partout. Ce même endroit a été transformé en piège à touristes envahi par des hordes de chinois. Il est bien difficile de décrire l'atmosphère de l'endroit qui était à la fois pesante, tout en ayant cette espèce d'hystérie venant des touristes, dont nous faisions partie, qui veulent prendre des photos devant tous les monuments commémoratifs. Ajoutez à ça les boutiques qui essayent de vous vendre des produits "made in North Korea", ou "made in DMZ" et vous comprendrez l'euphorie et aussi un peu le malaise que nous avons ressentis lors de notre visite.
Écrit à droite en coréen : "Si ma patrie (Corée unifiée) n'existe pas, je n'existe pas non plus"
Les autobus touristiques, et dans le fond un parc d'attraction construit à l'entrée de la DMZ
D'autres monuments commémoratifs
Outre les monuments et le bateau viking, le point d’intérêt principal du site d'Imjingak est sans doute le "Bridge of Freedom", pont par lequel les soldats étaient rapatriés de Corée du Nord pendant la guerre et qui jusqu'à 1998 était un des rares points de connexion par voix ferrée entre les deux Corées. Le pont existe toujours, mais l'accès est aujourd'hui bloqué.
A l'arrière plan dans le brouillard, the Bridge of Freedom
Barbelés et messages de familles à l'entrée du pont
Une vieille locomotive d'un train qui servait à  traverser jusqu'en Corée du Nord
Le point au niveau duquel l'accès au pont est bloqué. On peut y voir des messages d'appel à l'unification
Après avoir visité Imjingak, nous avons été transférés dans un autre bus plus grand, dans lequel nous avons rejoint un groupe de touristes japonais et un groupe de touristes chinois. Le bus a été arrêté à un checkpoint avant de traverser la rivière et on nous a demandé de sortir nos passeports. Un militaire armé est monté dans le bus pour brièvement vérifier qu'il n'y avait rien d'anormal et regarder la liste des passeports établie par notre guide, mais aucun contrôle approfondi. Vu le nombre de bus qui attendaient, on peut comprendre qu'ils ne vérifient pas en détails.

De l'autre côté du pont, il y avait encore plus de tours de garde et de barbelés, et cette fois ci, la présence militaire était bien visible. Il y avait également ces panneaux pas très rassurants sur le côté de la route invitant les visiteurs a rester sur le bitume s'ils ne voulaient pas exploser sur une mine. Notre guide a profité de ce moment pour nous raconter qu'il était arrivé une fois auparavant qu'un autobus touristique rate un virage du fait d'une route humide et qu'il ait fait exploser une mine. Fort heureusement, il n'y aurait pas eu de blessés, mais la route est désormais fermée en cas de fortes pluies ou verglas.

Nous sommes ensuite arrivés à la station de train Dorasan, à côté de l'entrée du complexe industriel joint de Kaeseong. On nous a expliqué qu'après la réunification, cette gare avait pour vocation de devenir un point de passage clé pour rejoindre l'Europe en transsibérien via Pyeongyang, mais que d'ici là c'était la seule gare depuis laquelle on pouvait se rendre à Kaeseong en Corée du Nord. On notera qu'avec les tensions récentes entre les deux Corées, le passage vers Kaeseong était fermé lors de notre visite. Cependant, la réouverture aura peut-être lieu prochainement car durant le week-end de notre visite, les officiels des deux pays se sont retrouvés à Panmunjeom en pourparlers et sont tombés d'accord sur une réouverture.
Un entrepôt qui sert à stocker les produits de Kaeseong
La carte du transsibérien à l'intérieur de la gare
A l'intérieur de la gare, nous avions la possibilité d'acheter de faux tickets pour Pyeongyang, ou bien de visiter la supérette qui elle aussi proposait toutes sortes de produits supposément venus de Corée du Nord. Mais l'attraction principale de l'endroit était sans doute le soldat occupé à surveiller on ne sait pas trop quoi, et dont l'activité principale consistait à être pris en photos avec les touristes. Il y a franchement des endroits pires que la gare de Dorasan pour faire son service militaire. Après avoir hésité un moment, nous avons craqué nous aussi. La visite étant tout de même à 42.000wons (environ 30€), ça valait bien une photo avec un soldat.
Avec le panneau "To Pyeongyang" d'un côté et l'affiche "rejoignez l'armée" de l'autre, cette photo est une œuvre d'art !

L'intérieur de la station. Ça fait vraiment station fantôme tout de même.
La photo de groupe
La suite de la visite nous amena sur la colline surplombant la gare, à l'observatoire de Dorasan depuis lequel on peut normalement voir la Corée du Nord. Pas de chance pour nous, avec le brouillard c'était raté ! Mais ça aurait pu être pire, nous aurions pu faire toute la visite sous la pluie, car ici en Corée c'est la période de la mousson.


L'observatoire de Dorasan mériterait peut-être la palme des endroits bizarres que nous avons visités à la DMZ. Pour une raison qui nous échappe toujours, on nous a interdit de prendre des photos dans l'observatoire avec comme menace d'effacer les cartes mémoires de nos appareils photos et téléphones. Il n'y avait pourtant absolument rien dans cet observatoire. C'était un amphithéâtre dans lequel on nous a projeté un film sur la zone démilitarisée et dans lequel il n'y avait rien d'autre qu'une maquette de la dite zone démilitarisée.
Il s'est avéré que le groupe de soldats qui faisaient les gros yeux à l'intérieur de l'observatoire ne servait pas tant à surveiller que personne ne prenait de photos, mais surtout à pousser les groupes de touristes à l'extérieur à la fin de la projection afin que le groupe suivant puisse entrer plus vite.
La transformation de l'observatoire en piège à touriste était encore plus flagrante à l'extérieur avec une interdiction de prendre des photos à moins de 10 mètres du bord de l'observatoire, mais le droit de payer pour observer la Corée du Nord avec des jumelles.
A l'extérieur de l'observatoire
La Corée du Nord dans le brouillard. Oui, nous avons quand même pris une photo.
Nous avons avancé dans notre parcours avec la visite du site du 3ème tunnel d'invasion. Depuis la fin de la guerre de Corée, la Corée du Nord aurait creusé de nombreux tunnels d'invasion sous la zone démilitarisée afin de pouvoir attaquer Séoul par surprise. A ce jour, 4 de ces tunnels ont été découverts, mais beaucoup de coréens du sud soupçonnent qu'il y en ait d'autres.
Le 3ème tunnel en particulier est le plus proche de Séoul (52km) et a été découvert en 1978 grâce à des informations données par un déserteur nord-coréen. Lorsque la Corée du Sud commença a creuser et à envoyer de l'eau sous pression pour identifier l'emplacement exact du tunnel, Kim Il Sung le leader nord-coréen de l'époque, qui inspira de nombreux génies de Corée du Nord tels Kim Jeong Il et Kim Jeong Eun, ordonna de faire peindre en noir l'intérieur du tunnel afin de faire croire que la Corée du Nord avait creusé ici pour extraire du charbon et pas du tout pour envahir la Corée du Sud.
Dans une autre version de l'histoire, la Corée du Nord accusa Séoul d'avoir creusé elle-même les tunnels puis de lui avoir fait porter le blâme dans le but de justifier une attaque contre le régime communiste.
L'entrée du site du troisième tunnel d'invasion
Les photos étant interdites dans le tunnel (de toute façon il y fait trop sombre) voici une réplique de ce que l'on pouvait voir dans le musée avant le tunnel.
Notre seule passage dans la véritable DMZ, ou plutôt sous la DMZ, a eu lieu lorsque nous sommes descendus dans ce tunnel dont les 450 premiers mètres sont ouverts aux touristes. Au delà se trouvent 3 murs construits par l'armée sud-coréenne, avec le tunnel rempli d'eau, pour bloquer le passage. Le tunnel étant assez bas de plafond et aussi relativement étroit, il était nécessaire de prendre des casques pour le visiter sans risquer de se blesser. Et effectivement, les casques ont pas mal tapé contre le plafond.
L'entrée du tunnel avec les casques (picture from Wikipedia)
Enfin, pour terminer la visite, nous nous sommes rendus dans un village situé près de la DMZ, où il était possible d'acheter de nombreux produits agricoles. La zone autour de la DMZ est réputée très écologique car la présence humaine est très limitée. Au sein-même de la DMZ, de nombreuses espèces animales et végétales vivent dans le calme et sans perturbation humaine (toutefois, c'est quand même au milieu des mines me diriez-vous).

Du riz de la DMZ ? Pas facile de ramener 10kg chez soi tout de même !
Et puisque nous n'avons pas pu visiter la JSA, nous terminerons cet article avec une photo de la maquette de la JSA que nous avons pu prendre avant de descendre dans le tunnel.


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